Le film d’Arthur Lubin parait bien vieillot aujourd’hui. Pourtant filmé en “Technicolor flamboyant”, dit la publicité, et avec des numéros chantés, il met en valeur Suzanna Foster qui interprète Christine… Dubois. Là encore, Raoul est un gros ténor vieillissant, mais le metteur en scène a choisi de jouer sur son côté ridicule: Nelson Eddy interprète en fait un double rôle, celui d’un gendarme amoureux de Christine, et celui de son sosie, un chanteur d’opéra de la troupe. Le film tourne à la franche comédie lorsqu’à la fin, Christine, lasse de leurs querelles, les plante là tous les deux et ils se retrouvent à dîner ensemble!
Bref, on n’est pas dans le ton voulu par rapport au roman…
Néanmoins, Claude Rains dans le rôle du fantôme, fait son boulot. Il se veut tragique, ou menaçant, mais est en tous cas toujours pitoyable. Le problème est plutôt le changement apporté à l’histoire: Erique (sic) Claudin est violoniste, et ses rhumatismes ne lui permettant plus de jouer correctement, il est viré brutalement de l’Opéra. En même temps, il est parti chez un imprimeur porter l’oeuvre de sa vie, une cantate, mais, suite à un quiproquo, s’imagine qu’on veut le voler alors qu’il n’a plus rien, et tue l’imprimeur. Sa femme, affolée, lui jette alors de l’acide au visage et cela, comme dans la plupart des thématiques horrifiques en littérature, le rend fou dangereux - Claude Rains interprétera dans son film suivant l’Homme Invisible, qui utilise un motif semblable. Il est, de plus, attaché à Christine d’une façon incompréhensible. Est-il son père? On ne le sait vraiment.
Ce film souffre donc aujourd’hui des ravages commis par Hollywood quand il est question de transformer une histoire pour qu’elle plaise au plus grand nombre.
La musique est assez décousue puisqu’on apprend dans les suppléments DVD que les producteurs ne voulaient pas payer des droits exorbitants et ont donc mis bout à bout des morceaux chantés libres de droit ou arrangés pour l’occasion. L’ensemble, s’il est vivace, n’est quand même pas très joli.
Pour finir, le film obtient l’Oscar pour la photo couleur et pour les décors. Il ne faut pas oublier que le film a été réalisé pendant la guerre et qu’il a été un gouffre financier car il était très somptueux.